LE ROI DE L’EVASION (2009)

Alain Guiraudie a l’art de sortir des sentiers battus !

Avec ce nouveau film, Alain Guiraudie nous convie à un voyage dans le truculent univers qui le caractérise : le sourire malin sous la farce, le mariage du réalisme et du fantasque, les charmes de la vie de province avec les tracteurs, la bicyclette, la « drague sauvage » sur les aires de repos menacée par Internet, la peau au contact du soleil et de la nature, parce qu’on s’y déshabille beaucoup, le sexe dédramatisé, décomplexé, décloisonné, loin de toutes les étiquettes du ghetto !

Il y en a du feuilletage croustillant dans Le roi de l’évasion ! C’est d’abord un film policier avec meurtre et trafic d’un « pantagruélion », la « beurougne », sorte de pomme de terre au goût de vanille, plante miraculeuse qui assure une bandaison de plusieurs heures sans défaillance ! C’est aussi l’histoire de la crise de la quarantaine d’un homme bien pourvu en chair appétissante, loin des critères de sélection des top models et autres escorts des magazines, qui, devant le vide répétitif de sa vie sexuelle, en vient à se dire qu’il n’aime finalement peut-être pas les hommes et qu’il est encore temps pour lui de faire un coming out à l’envers : se laisser tenter par une belle adolescente ardente, en rupture de scolarité et de famille ! C’est enfin une fine réflexion sur la traversée des apparences : les notables ont besoin de se décoincer, les chercheurs de vérité d’aller au bout de leurs phantasmes pour mieux se connaître, les rabelaisiens ont aussi un cœur qui bat sous la chair truculente…

Pas de réponse aux questions, jamais, pas de prêchi-prêcha, mais une intrigue folle, irrévérencieuse, des situations juteuses et quelle audace ! On ne remerciera jamais assez Alain Guiraudie pour son hymne à l’amour intergénérationnel ! Chez lui, les silver daddies et les minettes allumées sont tous et toutes à croquer. L’essentiel, c’est de se laisser porter par son désir, sans bégueulerie, sans tricherie, mais en cherchant et en suivant sa pente. Il faut oser le filmer, avec en sourdine l’idée que l’amour mérite toutes les cavales et que sa quête ne peut que connaître des crises, l’important étant de ne jamais se laisser bouffer par les modes, les routines tristes, de ne jamais passer à côté de soi… De l’art de faire voler en éclats les normes et les marges !

À voir sans modération !