FLEUR DE CHAIR

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Fleur de chair
de Yvan Quintin
Catégorie(s) : Littérature => Francophone
critiqué par Spiderman, le 7 février 2009
(Inscrit le 14 juin 2008, 46 ans)
La note:
Ikebana sensuel

Six nouvelles mettant en scène des garçons et des filles attirés par leur semblables de même sexe. Six récits construits avec la vigueur et la sève de l’écrivain qui réussit à faire passer une foule d’émotions en si peu de phrases. Six histoires dont aucune n’est, contrairement à ce que pourrait laisser croire la couleur assez insupportable de la couverture, à l’eau de rose. Six situations où le cérébral fait jeu égal avec les sens.
L’Enéide revisitée, la plus longue des nouvelles, ne m’a pas passionné. J’ai d’abord cru – ma culture classique ayant ses limites ! – à un essai de résumé centré sur les amours « grecques » . Renseignement pris à la meilleure source (Virgile n’était pas disponible ce jour-là), il s’agit en fait du livre 9 où Nisus et Euryale vivent leur passion avec des détails qui auraient sans doute interpellé quelques lycéens … et effrayé pas mal d’enseignants et de parents !

Profitons du reste : les jeunes gens et jeunes filles qui s’essaient aux amours de leurs homo-logues ont des questionnements assez intemporels. La force d’Yvan Quintin est de planter personnages et décors, ambiances et contextes, avec un minimum de mots qui permettent au lecteur d’élaborer des hypothèses tout au long du récit… en attendant la ph(r)ase finale qui a peu de chance de coïncider avec ses prémonitions.

Un ado qui tient fatalement la chandelle à son complice de plaisirs onanistes amoureux d’une fille, Denise amoureuse de Judith sous l’occupation allemande, un embarquement pour Cythère à bord d’un navire de commerce, une chaude garde à vue, et une drague dans un club au nom de calèche, sont les thèmes de ces aventures où séduction, désir, culpabilité, étreintes et libérations mènent le lecteur sur des voies qu’il connaît mais par des moyens qui vont le surprendre. Comme le maître japonais qui construit son « arrangement floral » avec l’expérience de ses prédécesseurs, les règles de son art et les fleurs de la saison et du lieu où il officie, Yvan Quintin s’appuie sur sa culture littéraire pour élaborer d’élégants bouquets de fleurs de chair dont le cœur est une énigme de sensualité et de désir orchestrée par un esprit aspirant autant à un plaisir immédiat qu’à des amours idéales.