Un film récent, à voir, Call Me by Your Name,…

Les deux génériques de ce film – celui du début, celui de la fin – sont magnifiques. Voilà ce qu’il est d’abord possible de dire à propos de Call Me by Your name ! Le déroulement ne doit en aucune façon être révélé à celui qui n’a pas encore vu le film et bien malin celui qui serait en mesure de rendre par de la prose un climat qui doit tout à une approche poétique et sentimentale des situations vécues par les personnages de cette histoire.

Certains plans silencieux « parlent » mieux qu’aucun discours, certaines émotions s’insinuent dans l’esprit – disons même le cœur – du spectateur de manière si naturelle qu’il peut facilement s’imaginer que c’est sa propre existence qui est en jeu, que ce qui le trouble ressemble à ce qu’il a déjà connu, plus sûrement à ce qu’il aurait aimé connaître aussi.

Elio, le jeune héros du film, a dix-sept ans. C’est sensiblement l’âge de Roméo, exactement – à une nuance près… – les mêmes premiers émois du cœur que ceux du personnage shakespearien. L’action est située en Italie, en partie dans une villa de rêve entourée d’un jardin où il suffit de tendre le bras pour cueillir une pêche juteuse ou un abricot mûr à point. On se baigne dans des endroits sublimes, on fait du vélo dans une campagne idyllique ou dans des rues bordées de palais moyenâgeux qui ne sont même pas des décors de cinéma mais des lieux de vie bien réels comme il en existe encore tant en Italie. L’été s’écoule lentement, partagé entre des activités sérieuses (lecture, archéologie, musique), d’autres voluptueuses.
Nous sommes en 1983. Comme on savait alors vivre avec grâce, ou même vivre tout court, en ces temps où nul n’était accroché à son téléphone portable ! À cette époque, en Italie, on trouvait encore de vieux trains dont chaque compartiment disposait d’une porte ouvrant directement sur le quai.

Ce qui n’a pas changé – c’est en tout cas à espérer – c’est la manière qu’on les êtres de se désirer, de s’aimer ; parfois de se faire du mal et de souffrir.

Oh ! ce générique de fin. Si j’affirme que c’est l’un des plus beaux moments du film, on ne me croira pas… jusqu’à ce qu’on l’ait vu. Il est bouleversant, il vous remue l’âme et rappelle, à ceux qui l’auraient oublié, qu’il est des souffrances auxquelles on ne renoncerait pour rien au monde. Le jeune acteur Timothée Chalamet, qui interprète cette scène tout en émotion contenue, donne ici la pleine mesure d’un talent d’une subtilité sans exemple. Il est magnifique d’un bout à l’autre du film.

Que les autres interprètes me pardonnent – l’un d’entre eux tout spécialement – si je n’en dis pas davantage à leur sujet, ce serait dévoiler une partie de l’intrigue, ce que je me refuse à faire. Mais la distribution entière est remarquable, avec une mention spéciale pour… mais non, sous peine d’éventer la surprise, je ne peux pas call him by his name…

Alain Sœfffler

PS du webmestre : à remarquer dans le coin droit en haut de la couverture la tête du Faune Barberini (Glyptothèque de Munich) dont on peut trouver la reproduction complète dans l’excellent essai de William Marx, Un savoir gai, 2018, aux éditions de Minuit.